L’action de la vitamine D au niveau de l’intestin favorise la croissance d’une espèce de bactérie qui joue un rôle clé dans la réponse immunitaire au cancer.
Contrairement aux autres vitamines, qui peuvent être facilement obtenues par l’alimentation, la vitamine D est plutôt rare dans la nature (à l’exception de certains poissons, comme le saumon) et est en majeure partie produite à la suite de l’exposition de la peau aux rayons UVB du soleil. Durant l’été, il est extrêmement facile de combler les besoins en vitamine D: par exemple, une exposition modérée du visage et des bras au soleil de midi (d’une durée qui ne cause pas d’irritation de la peau) équivaut à une dose d’environ 2000 UI de vitamine D (1). Cette exposition doit cependant absolument se faire à l’extérieur, car les rayons UVB ne traversent pas les fenêtres de la voiture, de la maison ou du bureau.
Il faut utiliser intelligemment le soleil pour maintenir des taux optimaux de vitamine D, car cette vitamine joue plusieurs rôles extrêmement importants dans le maintien d’une bonne santé, en particulier dans le bon fonctionnement du système immunitaire, ainsi que dans la prévention du cancer. Plusieurs études ont en effet rapporté qu’une carence en vitamine D est associée à un risque accru de plusieurs types de cancers ainsi que de récidives de certains d’entre eux après les traitements (sein, côlon). Cet effet anticancéreux de la vitamine D est vraisemblablement lié à son effet inhibiteur sur la croissance des cellules tumorales, son blocage de la formation de nouveaux vaisseaux sanguins dans les tumeurs (angiogenèse) ainsi qu’à son effet stimulateur du système immunitaire.
Action intestinale
Une étude récente permet de mieux comprendre la contribution de l’immunité à l’action anticancéreuse de la vitamine D (2). Dans cette étude, les chercheurs ont découvert que des souris soumises à un régime riche en vitamine D présentaient une meilleure résistance immunitaire aux cancers greffés expérimentalement et de meilleures réponses à un traitement d’immunothérapie.
Étonnamment, les chercheurs ont découvert que la vitamine D agit sur les cellules épithéliales de l’intestin, provoquant une augmentation de la quantité d’une bactérie spécifique appelée Bacteroides fragilis. Cette bactérie semble cruciale à l’effet positif de la vitamine D sur l’immunité anticancéreuse, car l’inoculation de la bactérie aux souris s’est avérée suffisante pour atténuer la croissance des tumeurs lorsque les taux de vitamine D sont adéquats. Cependant, la même expérience réalisée chez des animaux carencés en vitamine D a été sans effet sur la progression tumorale, ce qui montre que cette vitamine est essentielle à l’action anticancéreuse de la bactérie.
Microbiome anticancéreux
Ces résultats sont en accord avec des études antérieures qui ont montré que la composition du microbiome intestinal influence fortement l’efficacité de l’immunothérapie (3). Par exemple, les patients atteints d’un mélanome qui consomment beaucoup de fibres dans leur alimentation et qui ont par conséquent un microbiome diversifié répondent mieux aux thérapies qui stimulent le système immunitaire que ceux qui n’en consomment pas ou très peu. Puisque Bacteroides fragilis est l’une des bactéries les plus importantes dans ce lien microbiome-immunité anticancéreuse, la découverte que la vitamine D peut influencer positivement son action montre que le maintien de taux optimaux de cette vitamine représente une autre façon de profiter des propriétés anticancéreuses de cette bactérie. D’ailleurs, une analyse réalisée en parallèle par les chercheurs montre que ce sont les patients qui présentent les plus hauts taux de vitamine D qui répondent le mieux à l’immunothérapie.
Concrètement, ces résultats confirment qu’une exposition modérée au soleil représente une façon simple d’optimiser nos systèmes de défense anticancer. Dans l’hémisphère nord, au nord du 40e parallèle, l’été est la seule saison qui permet d’atteindre cet objectif, car l’intensité des rayons UVB est trop faible le reste de l’année pour parvenir à produire des quantités adéquates de vitamine D. De multiples agences de santé suggèrent donc de compenser par la prise de suppléments de vitamine D (1000-2000 UI) pendant cette période.
(1) Wacker M et Holick MF. Sunlight and Vitamin D: A global perspective for health. Dermatoendocrinol. 2013; 5: 51-108.
(2) Giampazolias E et coll. Vitamin D regulates microbiome-dependent cancer immunity. Science 2024; 384: 428-437.
(3) Dai Z et coll. Intestinal microbiota: a new force in cancer immunotherapy. Cell Commun. Signal. 2020; 18: 90.