Un rappeur dont l’ami d’enfance a été abattu l’automne dernier à Terrebonne vient d’écoper de 60 mois de détention pour avoir lancé une arme à feu chargée par la fenêtre de son véhicule lors d’une poursuite policière en plein quartier résidentiel.
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«La possession d’une arme à feu chargée dans un endroit public est grave et endémique, a souligné le juge Serge Délisle, au palais de justice de Longueuil. C’est un fléau et la réprobation sociale à l’égard de tels crimes est forte.»
C’est devant une preuve «accablante» que le magistrat a récemment condamné Jeff Lynch, en détention préventive depuis ses crimes commis à Saint-Hubert, sur la Rive-Sud de Montréal, en avril 2022.
Un patrouilleur avait d’abord interpellé l’homme de 34 ans puisqu’un des feux de freinage de son Honda Civic blanc était non fonctionnel. Une entreprise de Saint-Eustache était enregistrée comme propriétaire de l’auto.
Erreur coûteuse
L’accusé a dit ne pas avoir son permis de conduire et a fourni au policier un faux nom, qu’il a toutefois erronément épelé.
Grâce à des vérifications dans la base de données policières, l’agent a pu découvrir sa réelle identité, mais aussi que son permis était suspendu et «qu’il serait armé et dangereux», lit-on dans le résumé des faits déposé en cour.
Jeff Lynch, alors sous l’influence de drogues, a pris la poudre d’escampette quand deux autres patrouilleurs sont arrivés en renfort pour l’arrêter.
La principale raison: le rappeur, appelé «Da Trigg», contrevenait à ses conditions de remise en liberté en ayant avec lui une arme à feu.
Dans sa fuite, il a donc projeté un pistolet semi-automatique de marque Taurus, contenant 11 balles, sur le terrain d’un immeuble à logements.
La poursuite policière, durant laquelle l’accusé aurait roulé à environ 80 km/h, s’est étalée sur un kilomètre.
Auto «chaude»
Avant d’être interpellé, Lynch se trouvait notamment avec Gordy Jean-Paul. Ce rappeur connu sous le nom de «Young Dev» qui était lié aux gangs de rue a été tué par balle en octobre dernier.
«Avant qu’il ne parte avec la voiture, Gordy Jean-Paul dit au délinquant que l’auto est “chaude”. Il comprend qu’il y a soit de la drogue ou une arme dans la voiture», a rapporté le jugement, détaillant la version de l’histoire de l’accusé.
Le tribunal a qualifié toutefois d’«invraisemblable» l’argument de Lynch voulant qu’il ait réellement pris connaissance de l’arme lors de l’interpellation policière.
«Le bon sens»
Le juge Délisle a rappelé, à travers les facteurs aggravants de la cause, que Lynch et Gordy Jean-Paul étaient des amis d’enfance et des partenaires d’affaires.
Lynch était même aux côtés du défunt quand ce dernier a ouvert le feu dans une violente fusillade au Cabaret Doric, en 2018.
L’accusé a aussi tenté, en vain, de se faire rassurant sur son mode de vie.
Il plaidait qu’il n’existait aucun lien entre son nom de rappeur, «Da Trigg», soit une possible référence à la détente d’une arme, sa compagnie de production 2DI4 (to die for), le nom de sa boutique Watch ta life et les armes à feu.
Il s’agit d’une thèse qui «défie le bon sens», a toutefois résumé le juge Délisle.