La Turquie a coordonné, à Ankara, un échange de 24 prisonniers ainsi que de deux enfants entre la Russie et plusieurs pays occidentaux.
Le journaliste Evan Gershkovich et l’ancien soldat de la marine américaine Paul Whelan font partie des 24 détenus libérés lors de cet échange complexe.
De nombreux dissidents russes ont également été libérés.
Voici le portrait de ces détenus.
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Libérés par la Russie
Evan Gershkovich
Le journaliste américain du Wall Street Journal, âgé de 32 ans, a été le premier journaliste occidental écroué en Russie pour espionnage depuis l’époque soviétique.
Accusé d’avoir collecté des informations sur une usine de chars russes pour la CIA, ce que son journal et Washington démentaient fermement, il a été condamné, le 19 juillet, à 16 ans de prison dans un procès expéditif et à huis clos.
Originaire du New Jersey, près de New York, il est issu d’une famille juive soviétique ayant quitté l’URSS à la fin des années 1970.
Il était le premier journaliste américain arrêté pour espionnage en Russie depuis la guerre froide. Son procès a été vivement dénoncé par le gouvernement américain.
Paul Whelan
L’ancien soldat de la marine de guerre américaine Paul Whelan a passé près de six ans dans les prisons russes après son arrestation à Moscou en décembre 2018.
Âgé de 54 ans, il a été condamné en 2020 à 16 ans de prison pour des accusations d’espionnage que lui et le gouvernement américain nient avec ardeur.
Arrêté dans un hôtel de Moscou, il était alors directeur de la sécurité internationale du groupe américain BorgWarner, un fabricant de pièces détachées dans le secteur automobile.
Sa présence en Russie a été expliquée par la tenue du mariage d’un ami.
Whelan est également citoyen irlandais, britannique et canadien.
Oleg Orlov
Oleg Orlov, âgé de 71 ans et figure de la défense des droits de l’homme, a été condamné fin février à deux ans et demi de prison pour des dénonciations répétées de l’offensive russe en Ukraine.
Biologiste de formation, il a rejoint dès sa création, à la fin des années 1980, l’ONG Memorial, devenue un pilier de la quête de vérité sur les crimes de l’URSS.
Lilia Tchanycheva
Lilia Tchanycheva, 42 ans et ancienne coordinatrice de l’équipe du défunt opposant Alexeï Navalny dans l’Oural, avait été condamnée à neuf ans et demi de prison pour «extrémisme».
L’opposante avait été arrêtée en novembre 2021 après que les organisations de Navalny eurent été interdites pour «extrémisme» et son chef, emprisonné.
Ksenia Fadeïeva
Autre alliée d’Alexeï Navalny, Ksenia Fadeïeva, âgée de 32 ans, avait été élue en 2020 au conseil municipal de Tomsk, en Sibérie, avec d’autres militants indépendants.
Après l’interdiction en 2021 du mouvement de Navalny, Mme Fadeïeva avait refusé l’exil à l’étranger malgré les risques.
Elle avait été condamnée en décembre 2023 à neuf ans de prison, aussi pour «extrémisme».
Vladimir Kara-Mourza
Kara-Mourza, éminent opposant russe et défenseur des droits de l’homme de 42 ans, féroce détracteur du Kremlin, a été condamné à 25 ans de prison pour trahison en avril 2023.
Il a été honoré en mai par le jury du prix Pulitzer, pour «ses articles passionnés écrits au péril de sa vie depuis sa cellule de prison».
Kara-Mourza est un résident permanent des États-Unis et possède la double nationalité russe et britannique. Il s’est opposé publiquement à la guerre menée par Moscou en Ukraine.
Selon plusieurs médias d’investigation, les services secrets russes sont impliqués dans deux empoisonnements qu’il a subis en 2015 et en 2017.
Il ne s’en est jamais totalement remis et souffre d’une pathologie neuromusculaire.
Selon CNN, l’opposant russe aurait été récemment déplacé à plusieurs reprises et transféré dans un hôpital pénitentiaire en Russie au début du mois.
Ilia Iachine
Militant actif en Russie depuis les années 2000, Ilia Iachine, âgé de 41 ans, a été condamné fin 2022 à huit ans et demi de prison pour avoir dénoncé «le meurtre de civils» dans la ville ukrainienne de Boutcha.
Membre du Parlement municipal moscovite au moment de son arrestation, il a lutté aux côtés des opposants Alexeï Navalny, mort en détention en février 2024, et Boris Nemtsov, assassiné en 2015.
Alexandra Skotchilenko
L’artiste de 33 ans a été arrêtée en Russie en avril 2022 pour avoir remplacé les étiquettes de prix dans un supermarché par des messages dénonçant l’offensive en Ukraine.
Elle a écopé de sept ans d’emprisonnement en novembre 2023.
Alsu Kurmasheva
La journaliste russo-américaine a été condamnée à six ans et demi de prison après avoir été reconnue coupable de diffusion de fausses informations sur l’armée russe.
La journaliste de 47 ans, qui résidait à Prague, avait été arrêtée en Russie en octobre 2023 au cours d’un voyage d’ordre privé.
Kurmasheva a été condamnée le même jour que celui de la condamnation de Gershkovich.
Andreï Pivovarov
Arrêté en Russie en 2021, l’opposant russe Andreï Pivovarov, 42 ans, avait été condamné un an plus tard à quatre ans de prison pour avoir milité pour une organisation interdite, Otkritaïa Rossia (Russie ouverte), liée à l’ex-oligarque et opposant exilé Mikhaïl Khodorkovski.
De sa cellule, il a fait campagne aux législatives de septembre 2021, avec le slogan «Plus fort que la peur», son équipe le présentant comme le «candidat menotté».
Vadim Ostanine
Allié d’Alexeï Navalny, Vadim Ostanine, 47 ans, avait été condamné à neuf de prison pour «extrémisme» après avoir dirigé le bureau de l’équipe de Navalny à Biïsk, dans l’Altaï.
Dieter Voronine
Politologue de nationalité russe et allemande, Dieter Voronine avait été condamné en mars 2023 à 13 ans de prison pour «haute trahison» dans l’affaire du journaliste russe Ivan Safronov, spécialiste des questions militaires lui-même condamné, pour le même motif, à 22 ans et toujours en prison.
Kevin Lick
Kevin Lick, un jeune Russo-Allemand âgé de 19 ans, avait été arrêté en Russie en février 2023 puis condamné, en décembre de la même année, à quatre ans de prison pour «haute trahison».
Herman Moïjes
Juriste russo-allemand, il avait été arrêté fin mai 2024 à Saint-Pétersbourg, puis inculpé pour «haute trahison» et était en attente d’un procès.
Patrick Schöbel
Arrêté fin janvier 2024 à l’aéroport de Saint-Pétersbourg, le citoyen allemand Patrick Schöbel avait été accusé de trafic de drogue après avoir été interpellé avec des gommes à mâcher au cannabis.
Libérés par le Bélarus
Rico Krieger
L’Allemand Rico Krieger, qui serait médecin militaire et âgé de 30 ans, a été condamné à mort le 24 juin au Bélarus par un tribunal de Minsk, pour «terrorisme» et «mercenariat», puis gracié mardi par le président bélarusse, Alexandre Loukachenko.
Il est soupçonné d’avoir photographié des sites militaires au Bélarus en octobre 2023 pour les services secrets ukrainiens (SBU) et d’avoir déposé sous leurs ordres un engin explosif sur une voie ferrée près de Minsk.
Selon son profil LinkedIn, M. Krieger a travaillé comme infirmier pour la Croix-Rouge allemande et avait auparavant été employé comme agent de sécurité armé pour l’ambassade des États-Unis à Berlin.
Libérés par l’Occident
Vadim Krassikov
Vadim Krassikov est un ancien colonel de haut rang du FSB purgeant une peine d’emprisonnement à perpétuité dans une prison allemande.
Il figurait en tête de liste des prisonniers russes que Moscou souhaitait échanger.
Krassikov a été reconnu coupable du meurtre en 2019 de l’ancien combattant tchétchène Zelimkhan «Tornike» Khangoshvili dans le Kleiner Tiergarten de Berlin.
Le tribunal allemand qui a condamné Krasikov en 2021 a déclaré qu’il avait agi au nom de l’État russe, en tirant sur Khangoshvili «à la manière d’une exécution» en plein jour.
Khangoshvili a combattu contre les forces russes pendant les guerres de Tchétchénie et a ensuite déménagé en Géorgie, où il a survécu à plusieurs tentatives d’assassinat.
Artiom Doultsev et Anna Doultseva
Ce couple présumé d’espions russes, âgés d’environ 40 ans, avait été arrêté fin 2022 en Slovénie. Ils ont plaidé coupables et été condamnés mercredi par la justice slovène à plus d’un an et demi de prison pour «espionnage et falsification de documents», une peine équivalente au temps déjà passé en détention.
Selon des informations données par les médias, ces deux agents présumés des services de renseignement extérieur (SVR) étaient arrivés en Slovénie en 2017 avec des passeports argentins, sous les noms de Ludwig Gisch et de Maria Rosa Mayer Munos, et vivaient dans la capitale Ljubljana avant leur arrestation en décembre 2022.
Ils sont accompagnés de leurs deux enfants.
Pavel Roubtsov, ou Pablo González
Arrêté par les services de renseignement polonais près de la frontière ukrainienne, le 28 février 2022, Pavel Roubtsov avait été accusé d’être un espion de Moscou.
Il a également la nationalité espagnole, sous le nom de Pablo González, et travaillait comme journaliste pour le média en ligne Público et la télévision La Sexta.
Mikhaïl Mikouchine
Mikouchine est un espion russe arrêté en Norvège en 2022. Il travaillait à l’université de Tromsø, dans le cercle polaire arctique, se faisant passer pour un chercheur brésilien.
Roman Seleznev
Roman Seleznev est un pirate informatique et fraudeur de cartes de crédit reconnu coupable qui purgeait une peine de 27 ans de prison aux États-Unis.
Les responsables russes avaient d’ailleurs demandé que Seleznev, aussi connu sous les noms de «Track2», de «Bulba» et de «Ncux 3», fasse partie de l’échange Griner et Bout en 2022.
Seleznev a été arrêté aux Maldives en 2014. Il a été extradé vers les États-Unis et condamné en avril 2017 pour avoir piraté des ordinateurs de leurs points de vente.
En novembre de la même année, il a été condamné à 14 ans de prison pour son rôle dans un réseau de cyberfraude de 50 millions de dollars et pour avoir fraudé des banques de 9 millions de dollars grâce à un stratagème de piratage.
Vladislav Kliouchine
L’homme d’affaires russe a été condamné en septembre 2023 par un tribunal de Boston à 9 ans de prison pour le rôle qu’il aurait joué dans «un système complexe de piratage commercial», selon les autorités américaines.
Kliouchine a été arrêté à Sion, en Suisse, en mars 2021 et extradé vers les États-Unis en décembre 2021.
En plus de sa peine de prison, il a également perdu plus de 34 millions de dollars et a dû payer des dédommagements.
Vadim Konechtchenok
Extradé vers les États-Unis depuis l’Estonie au début du mois, Konechtchenok faisait face à des accusations de complot en raison de son rôle dans un réseau mondial d’approvisionnement et de blanchiment d’argent au nom du gouvernement russe.
Le bureau du procureur de New York a en effet expliqué dans un communiqué qu’il était un citoyen russe ayant des liens présumés avec l’agence de renseignement FSB.
Il est accusé de prendre part à un projet visant à fournir illégalement à la Russie des appareils électroniques et des munitions sensibles fabriqués aux États-Unis.
Avec les informations de l’Agence France-Presse