S’ils souhaitent gagner la confiance des éléments les plus modérés ou indécis, républicains comme démocrates doivent penser à reformuler des éléments de leurs programmes ou encore envisager des méthodes différentes.
Par exemple, Donald Trump cherche à redéfinir sa position sur l’avortement, puisque l’enjeu est crucial et qu’on l’associe directement à la décision de la Cour suprême qui renversait Roe c. Wade.
Pour Kamala Harris, la gestion de la frontière et l’immigration illégale constituent un défi de taille. Par le passé, elle a adopté une vision typiquement progressiste en ces matières et comme vice-présidente, c’est à elle que Joe Biden a confié de nombreuses responsabilités dans ce dossier épineux, véritable boîte de Pandore.
Un passé pas si lointain
Avant le début de la convention démocrate, les opposants et critiques de Kamala Harris relevaient son ton ferme et sans concession face aux propositions de Donald Trump pour régler la problématique de la frontière.
Au sujet de la construction du fameux mur proposé par le candidat républicain depuis la campagne 2016, elle a à maintes occasions répété que c’était un gaspillage stupide de fonds publics, tout en la qualifiant de «vaniteux projet médiéval» (janvier 2019).
Comme vice-présidente, au-delà du thème du mur, elle œuvrait au plan diplomatique avec les pays d’où proviennent les migrants et portait le message de l’administration selon lequel on souhaitait éviter de séparer des familles, tout en s’opposant aux demandes de déportations massives.
Cependant, tout comme le président Biden, elle a constaté qu’une majorité d’électeurs sont inquiets et qu’ils ont une perception négative des politiques de l’administration, même si le président a multiplié les initiatives, dépassant son prédécesseur à ce chapitre.
Pirouette électorale
Kamala Harris et ses stratèges ont donc profité de la convention pour rediriger le message présenté aux électeurs. La candidate démocrate veut durcir le ton.
Jusqu’où est-elle prête à aller en ce sens? En affirmant qu’elle signerait rapidement l’entente bipartisane du Congrès, entente plombée par les pressions de Donald Trump auprès de ses alliés républicains, elle ouvrait la porte au prolongement du mur souhaité par son adversaire.
Les démocrates se retrouvent ainsi avec une candidate qui, directement ou indirectement, appuie une stratégie dénoncée au sein du parti et rejetée par la majorité des experts en matière de sécurité (sauf pour des endroits ciblés).
Cette volte-face peut être partiellement justifiée par le désir de la démocrate d’agir rapidement et de tendre la main aux républicains. On peut aussi affirmer que les sommes dégagées pour le prolongement du mur ne s’élèveraient qu’à 650 millions, à des années-lumière des 18 milliards jadis exigés par Trump.
Les «flip-flops» ou volte-face sont légion en politique. Ce n’est pas le dernier auquel on assistera d’ici au 5 novembre. Sauf que cette fois, le changement est aussi soudain que spectaculaire.
Kamala Harris saura-t-elle convaincre l’électorat de la sincérité du changement de cap? À deux mois du scrutin, j’en doute fortement.