L’avantage salarial d’un diplôme universitaire s’est largement rétréci au Québec, passant de 81% à 60% entre 2017 et 2023, selon une nouvelle étude de l’Institut du Québec. Voici pourquoi faire des études supérieures est moins payant qu’avant.
• À lire aussi: Est-il plus facile de décrocher un emploi quand on est beau? «C’est sûr que ça joue un rôle important»
• À lire aussi: «Faire de l’argent, c’est attrayant»: pourquoi la Génération Z investit plus en Bourse que les autres
L’étude Étudier, est-ce encore payant? avance «qu’un adulte de 40 à 49 ans qui détient un diplôme universitaire gagne en moyenne 60% de plus qu’un diplômé d’études secondaires ou moins, et 35% de plus qu’un diplômé du professionnel ou du collégial», peut-on lire.
De passage au Québec Matin, la présidente du Réseau Annie RH confirme qu’étudier «vaut la peine», mais «beaucoup moins qu’avant». Cet écart salarial s’explique notamment par la pénurie de main-d’œuvre au Québec.
«Il y a des postes qui étaient occupés par des gens qui n’avaient pas de diplomation, mais qui, habituellement, requièrent une diplomation, souligne Annie Boilard. Le salaire à ces gens-là a été poussé vers le haut.»
L’augmentation du salaire minimum pourrait également expliquer le déclin de l’avantage salarial lié aux études. «Le salaire minimum a augmenté plus rapidement que la moyenne des salaires dans la période étudiée, de 2017 à 2023», précise la présidente du Réseau Annie RH.
Annie Boilard tient à rappeler que plus de 50% des personnes qui travaillent au salaire minimum n’ont pas de diplôme d’études secondaires, au Québec.
«Quand le salaire minimum monte plus rapidement que la moyenne des autres salaires, c’est comme si le salaire de ces employés-là prend l’ascenseur, soutient-elle. Il monte, alors il [le salaire] se retrouve avec une augmentation plus grande que le reste de la moyenne.»
Écart entre les femmes et les hommes
Si les données de cette étude révèlent des faits sur la diminution de la prime de scolarité, elles présagent un message sur notre société.
La baisse de l’avantage salarial est encore plus prononcée chez les hommes, selon les données de l’étude, notant une chute de 81% à 55% entre 2017 et 2023. «Il y a une nuance avec les hommes et les femmes, dit Mme Boilard. La différence est plus grande pour les hommes.»
Ces métiers, comme ceux de la construction, qui sont encore majoritairement occupés par les hommes, requièrent peu de diplomation, pour des «salaires très intéressants», insiste Annie Boilard.
«Ça nous dit que dans notre société, les hommes ont encore une rémunération supérieure qui donne un avantage», poursuit-elle.
Une disparité entre les hommes et les femmes est observée avec les données de cette étude. Les femmes moins scolarisées, qui travaillent dans le domaine de la santé ou de l’éducation, n’ont pas le même salaire que les hommes qui travaillent en construction, peut-on observer.
Selon la présidente du Réseau Annie RH, ce phénomène a été «accentué» par les programmes gouvernementaux. «On [le gouvernement] a créé des programmes à la fois pour la santé et la construction […] C’est comme si cet effet-là était exponentiel pour la période de temps étudiée», ajoute-t-elle.
Et la persévérance scolaire?
Pour Annie Boilard, la persévérance scolaire est une des incidences de cette étude. «Ça donne l’idée que c’est moins intéressant d’étudier. Alors, pourquoi se forcer à aller à l’école?», avance-t-elle.
Les chiffres démontrent que les personnes diplômées, minimalement d’un diplôme d’études secondaires ou de diplômes supérieurs, seraient «moins influencées par les fluctuations économiques», indique Mme Boilard.
L’avantage salarial des diplômés universitaires s’accentue avec l’âge, selon l’étude. La différence entre les diplômés et les non-diplômés pour les 20 à 25 ans est de 25%, contrairement à 71% pour les 45 à 49%.
«Quand on regarde les chiffres sur la durée totale d’une carrière, on se rend compte que les gens avec une plus haute diplomation, l’augmentation salariale s’accroit tout le long de leur vie professionnelle», note-t-elle.
Voyez l’entrevue complète avec Annie Boilard, ci-dessus.