Marc Bergevin a enfin brisé le silence trois ans après son départ du Canadien. Il apprécie la quiétude de sa nouvelle vie à Los Angeles où personne ne le reconnaît. «Tu peux aller au Starbucks sans que personne ne sache qui tu es», a-t-il dit.
C’était dans le cadre d’une longue entrevue avec Pierre Lebrun de The Athletic.
Parce qu’évidemment, Marc Bergevin n’a pas choisi un média francophone ni un journaliste de Montréal pour sortir de son mutisme.
Quand il est venu avec les Kings à Québec, on l’a demandé à entrevue. Mais non, on s’est fait dire d’oublier ça. C’était ridicule.
Vous savez les médias qui paient des prix de fou pour suivre le Canadien partout en Amérique du Nord et qui étaient toujours là pour offrir de la couverture à son équipe. Non, Marc Bergevin, ça ne lui tente plus de leur parler.
Il a dit qu’il a aimé chaque seconde de son passage à Montréal. Mais ça lui a pris du recul pour le réaliser.
Mais il reconnaît qu’il adore la quiétude à Los Angeles.
Les lépreux du peuple
C’est culotté quand même. Comme s’il était enfin libre. Comme si Montréal était une prison. Comme si c’était un cauchemar d’être reconnu par des amateurs de hockey. Comme si c’était des sangsues, la plèbe ou des lépreux qui se mettaient entre lui et son latte à la citrouille épicée du Starbucks.
Ces fans, ils ont été environ 7,5 millions à payer un billet pour aller voir son équipe au Centre Bell durant son règne. C’est plus que partout dans la ligue. Ces fans, ce sont eux qui s’abonnent par centaines de milliers à des chaînes de télé plus chères pour voir le Canadien. Ce sont eux qui achètent les chandails des choix de première ronde avant d’en acheter un autre, car le choix de première ronde n’est pas si bon finalement et est échangé en Caroline. Ces fans, c’est grâce à eux si Marc Bergevin a pu être payé environ 3 millions de dollars par année.
Marc Bergevin n’opérait pas à cœur ouvert. Il n’a pas eu à négocier un traité de paix dans le cadre d’un conflit armé. Il gérait un club de hockey, batinse! On s’en fout que le hockey soit une religion et que ça doit être ultra-anxiogène comme travail. À un moment donné, il faut relativiser et se rappeler que ça reste juste du hockey. Oui, c’était intense les critiques, mais c’est toujours comme ça, ça vient avec le poste. Comme la plupart des jobs prestigieuses dans le monde public, d’ailleurs.
Mais Marc Bergevin est encore amer de tout ça. C’est triste. On dit souvent que les médias de Montréal sont cinglants et que c’est difficile pour les joueurs ou la direction du club. Je n’ai pas de souvenir d’entrevue où Marc Bergevin se fait cuisiner ou bien qu’on lui manquait de respect.
Les palmiers et le hockey
Quand tu travailles dans le hockey, à mon avis, ça doit être pas mal plus intéressant de travailler dans un marché de hockey. Ceux qui aiment mieux le faire sous les palmiers dans l’indifférence totale, tant mieux pour eux. Mais je trouve que c’est comme un politicien qui veut se faire élire à Trois-Rivières, mais qui compte habiter aux îles Fidji.
Le pire dans tout ça, c’est qu’il n’a pas été mauvais, Marc Bergevin. Pas du tout même.
Imaginez comment c’était difficile pour lui de bâtir un bon club avec les sélections horribles que faisaient ses dépisteurs.
Vous savez qui est le joueur le plus productif en carrière parmi les repêchages des années Bergevin à Montréal? C’est notre bon vieux Alex Galchenyuk. Sinon, parmi les joueurs repêchés lors des sept premières années de Bergevin qui ont eu de l’impact, on compte Mikhail Sergachev et Artturi Lehkonen. C’est tout.
Oui, il fait partie de ceux qui tranchaient pour les repêchages. Mais à un moment donné, il doit suivre les conseils de ceux qui font ça à temps plein.
En dix ans de repêchage durant l’ère Bergevin, 30 joueurs repêchés ont joué au moins un match dans la LNH. Ils ont fait en moyenne 65 points en carrière.
Certes, les dernières années ont été bien meilleures avec les sélections de Caufield et Guhle, mais il n’a pas vraiment eu le temps d’en profiter.
Imaginez!
J’ai comparé avec une équipe qui repêche plutôt bien pour voir: les Stars de Dallas. Durant la même période, les joueurs d’impact qu’ils ont repêché c’est Esa Lindell, Valeri Nichuskin, Nick Paul, Jason Dickinson, Roope Hintz, Miro Heiskanen, Jake Oettinger, Jason Robertson, Thomas Harley, Wyatt Johnston et Logan Stankoven.
Imaginez si Marc Bergevin avait eu des cartes comme celles-là. On serait dans un autre univers à Montréal.
Oui, Bergevin a accordé un contrat épouvantable à Brendan Gallagher et à Josh Anderson. L’échange de Sergachev contre Drouin a fait mal aussi. Mais on était plusieurs à faire cet échange. Moi le premier.
Il faut quand même se rappeler que Bergevin, c’est lui qui est allé chercher Thomas Vanek contre Sebastien Collberg. Josh Gorges contre un choix de 2e ronde. Jeff Petry contre un choix de 2e ronde. Max Domi contre Alex Galchenuyk. Nick Suzuki et Tomas Tatar contre Max Pacioretty. Phillip Danault et un choix qui est devenu Alexander Romanov contre Dale Weise et Tomas Fleischmann. C’est lui qui est allé chercher Paul Byron au ballottage. Et il y a évidemment le fameux échange Weber contre Subban.
Bref, si ses recruteurs l’ont souvent échappé, lui a souvent réussi à rattraper le ballon avec plusieurs transactions qui aident beaucoup le duo Gorton-Hughes encore aujourd’hui.
Je crois que Marc Bergevin peut délaisser l’amertume. Je pense que tout le monde a tourné la page depuis longtemps. Ce serait le temps de faire la même chose et de revenir avec le sourire quand vous passez au Québec.
Petit fait intéressant, il est revenu sur la sélection de Kotkaniemi avant Brady Tkachuk en disant que ce dernier n’avait pas connu une bonne saison avant son repêchage et que son coup de patin était un problème. Il a tellement raison. C’est un petit commentaire bien placé à tous ceux qui ont crié au scandale, mais après l’éclosion de Tkachuk. Il avait fait 8 buts et 31 points en 40 matchs avec l’Université de Boston.