Pour la première fois depuis plus de 60 ans, un gouvernement français est tombé, plongeant le pays et le président Emmanuel Macron dans un contexte politique rarement vu.
«On se retrouve dans une période d’incertitude gouvernementale! Ça donne le sentiment que le pays est difficilement gouvernable parce que les partis ne savent pas jouer le jeu de la négociation parlementaire comme on le voit à Ottawa», observe Julien Tourreille, chargé de cours en science politique à l’Université du Québec à Montréal (UQAM).
Mercredi, après trois heures et demie de débats très agités, 331 députés ont finalement décidé de faire chuter le premier ministre Michel Barnier et son gouvernement, alors que 289 voix étaient requises. La dernière fois qu’une stratégie politique similaire avait été observée en France, c’était en 1962.
Pour y parvenir, les parlementaires de gauche et du parti d’extrême droite ont dû s’entendre et voter ensemble pour censurer l’exécutif sur des questions budgétaires, alors que la France est très fortement endettée.
Le parti de gauche radicale La France insoumise (LFI) a aussitôt réclamé la démission du chef de l’État.
La présidente du groupe LFI à l’Assemblée nationale, Mathilde Panot, a demandé à «Emmanuel Macron de s’en aller», réclamant «des présidentielles anticipées».
«On se trouve dans une situation où le président actuel doit remettre sa démission, mais rien n’oblige Emmanuel Macron à quitter [son poste]. Il pourrait décider de le faire, mais ce serait très étonnant», explique Julien Robin, doctorant en science politique de l’Université de Montréal.
Une première historique
La cheffe de l’extrême droite française Marine Le Pen a mentionné qu’elle laisserait «travailler» le futur chef du gouvernement pour «co-construire un budget acceptable pour tous» en insistant sur le fait qu’elle ne demandait pas la démission du président Emmanuel Macron.
Michel Barnier avait pris la parole avant le vote pour dissuader les élus d’aller vers la censure. La France consacre 60 milliards d’euros par an à payer les intérêts de sa dette, soit plus que pour sa défense ou son enseignement supérieur, a-t-il rappelé.
Ce vote du parti de gauche radicale La France insoumise et du parti d’extrême droite Rassemblement National dont Marine Le Pen est la cheffe pourrait cependant toucher le portefeuille des Français.
«S’il n’y a pas de loi budgétaire adoptée, automatiquement les impôts pourraient augmenter l’an prochain pour les Français. Bien plus qu’ils auraient augmenté s’il y avait eu une loi», a commenté Julien Toureille.
Rappelons que le président de la République française, Emmanuel Macron, a été élu en 2017, puis réélu en 2022 et que son mandat est en vigueur jusqu’en 2027. En France, le président de la République est responsable de choisir son premier ministre, qui doit, à son tour, former son gouvernement de coalition à partir des élus de plusieurs partis différents.
– Avec l’AFP