Plusieurs études montrent que l’absence de relations sociales adéquates est associée à une hausse importante du risque de plusieurs maladies chroniques et à une diminution de l’espérance de vie.
Au cours de l’évolution, plusieurs espèces d’animaux, qu’il s’agisse de mammifères, d’oiseaux, d’insectes et même de coraux, ont développé un mode de vie social qui améliore l’espérance de vie des individus ainsi que la survie de l’espèce (1).
Les humains n’échappent pas à cette règle, car un grand nombre d’études ont révélé que les interactions sociales sont essentielles au bien-être et jouent un rôle critique dans le maintien d’une bonne santé.
Par exemple, la Harvard Study of Adult Development, qui étudie depuis 1939 les facteurs impliqués dans le vieillissement en bonne santé, montre que ce sont les relations interpersonnelles de qualité qui représentent un des plus importants facteurs prédictifs du bonheur et de la bonne santé d’une personne au cours de sa vie.
Isolement social et solitude
À l’inverse, l’isolement social et la solitude ont été à maintes reprises associés à une hausse du risque de plusieurs maladies chroniques, autant du point de la vue physique que psychologique.
Ces deux conditions ne sont pas identiques: tandis que l’isolement social est un paramètre objectif qui est mesuré par le nombre et la fréquence de contacts interpersonnels (statut conjugal, réseau social, activités de groupe), la solitude est une perception qui fait plutôt intervenir une insatisfaction face à la qualité des rapports sociaux qu’une personne entretient (fréquence, intimité).
Une personne peut donc souffrir de solitude même en entretenant des relations avec plusieurs personnes et, à l’inverse, une personne isolée socialement peut ne pas se sentir seule même si elle vit à l’écart des autres.
Mais qu’il s’agisse de solitude ou d’isolement social, les études montrent que ces deux formes de carence de relations interpersonnelles ont des impacts majeurs sur plusieurs paramètres physiologiques.
Les études ont bien documenté une hausse de la pression artérielle, des taux de cortisol (et donc du stress) et de l’inflammation chronique chez les personnes isolées ou souffrant de solitude, et il est probable que ces effets négatifs contribuent à l’augmentation du risque de maladies cardiovasculaires, de démences, de certains cancers et de mortalité prématurée observée chez ces personnes.
Baisse de l’espérance de vie
Une intéressante analyse de 90 études populationnelles réalisées auprès d’un total de 2 205 199 personnes permet de bien visualiser l’impact de la solitude et de l’isolement social sur le risque de mortalité prématurée (2).
Les chercheurs ont montré que ces deux conditions augmentaient le risque de mortalité de toute cause et que cette hausse était particulièrement prononcée pour les personnes isolées socialement (risque accru de 32%, comparativement à 14% pour la solitude).
Même chose pour la mortalité liée au cancer, avec une hausse du risque de 24% pour l’isolement social contre 9% pour la solitude.
En revanche, la hausse du risque de mortalité liée aux maladies cardiovasculaires était similaire pour les deux formes de déficit relationnel (34 contre 30%).
Les chercheurs ont également observé que l’isolement social haussait considérablement le risque de mortalité par cancer pour les personnes atteintes d’un cancer du sein (51%), possiblement en privant les patientes touchées par ces épreuves d’un soutien qui leur permet d’atténuer les impacts négatifs associés à la maladie, en particulier le stress chronique qui est maintenant reconnu pour hausser le risque de récidive.
Il est donc certain qu’un réseau social dynamique représente un atout majeur pour améliorer l’espérance de vie en bonne santé.
D’ailleurs, dans toutes les régions du monde où l’espérance de vie est la plus élevée, un tissu social de qualité fait partie intégrante du mode de vie des individus, au même titre qu’un poids santé, une saine alimentation, une activité physique régulière, la consommation modérée d’alcool et la gestion adéquate du stress.
(1) Salguero-Gómez R. More social species live longer, have longer generation times and longer reproductive windows. Phil. Trans. R. Soc. B 2024; 379: 20220459.
(2) Wang F et coll. A systematic review and meta-analysis of 90 cohort studies of social isolation, loneliness and mortality. Nat. Hum. Behav. 2023; 7: 1307-1319.