Des chercheurs ont mis au point un test sanguin simple, rapide et économique qui permet de détecter le cancer du pancréas avant qu’il ne se propage à d’autres sites du corps.
L’adénocarcinome canalaire pancréatique (PDAC) est responsable de 95% de tous les cancers du pancréas et représente actuellement la troisième cause de décès liés au cancer.
Cette maladie est particulièrement sournoise, dans la mesure où ces tumeurs évoluent généralement sans provoquer de symptômes apparents et sont déjà parvenues à un stade avancé (métastatique) au moment du diagnostic. Cette détection tardive du cancer du pancréas est la grande responsable du caractère souvent incurable de la maladie: alors que le traitement de ce cancer à un stade précoce est associé à un taux de survie à 5 ans des patients de presque 50%, ce taux chute dramatiquement à 3% pour les stades avancés.
Une détection plus rapide des carcinomes pancréatiques est donc essentielle si on veut réduire significativement les ravages associés à cette maladie.
Ciseaux moléculaires
La progression de plusieurs types cancers, incluant celui du pancréas, passe nécessairement par la dégradation de l’environnement immédiat de la tumeur appelée la matrice extracellulaire, c’est-à-dire le réseau de fibres (collagène, entre autres) qui entoure les cellules et les immobilise au sein de l’organe. Pour y arriver, les cellules cancéreuses produisent plusieurs enzymes, des ciseaux moléculaires qui vont découper cette matrice et ainsi leur permettre de s’extirper de cet environnement pour aller envahir les autres tissus.
L’une des principales classes de ces ciseaux contient les protéases, des enzymes spécialisées dans la digestion des nombreux types de protéines qui constituent la matrice. La libération de ces protéases dans la circulation sanguine pourrait donc représenter une façon indirecte de détecter les premières étapes de la progression de cellules tumorales vers un cancer de stade plus avancé.
Détection de protéases
Pour détecter la présence de ces protéases dans le sang, une équipe de chercheurs a développé des nanocapteurs contenant une nanoparticule magnétique, attachée à un petit peptide fluorescent reconnu par les protéases de la matrice (1). Ils ont ensuite placé des millions de nanocapteurs dans un minuscule échantillon de sang pour les exposer à une présence éventuelle de protéases. Si ces enzymes sont présentes et actives, elles découpent le peptide présent dans les nanocapteurs, ce qui libère la molécule fluorescente. En utilisant par la suite un aimant pour aspirer tous les nanocapteurs non découpés, il est alors possible de mesurer le nombre de particules fluorescentes restantes.
Autrement dit, plus un échantillon sanguin contient de protéases actives, plus le signal fluorescent généré par l’échantillon sera important.
Les chercheurs ont testé le nanocapteur sur des échantillons de sang congelés de 356 personnes, certaines atteintes d’un cancer du pancréas, d’autres atteintes de formes non cancéreuses de maladie du pancréas (les pancréatites, par exemple) et de témoins sains.
Le nanocapteur a correctement identifié les personnes en bonne santé dans 98% des cas et a identifié les personnes atteintes d’un cancer du pancréas avec une précision de 73% et, chose importante, à tous les stades de la maladie.
La méthode a également toujours fait la distinction entre les personnes atteintes de cancer et celles atteintes d’autres maladies du pancréas, c’est-à-dire qu’il n’y avait pas de faux positifs.
Ce test peut être automatisé, ne coûte que quelques sous par échantillon et ne requiert que de petites quantités de sang.
Si les essais cliniques (en cours) confirment sa capacité à détecter les stades précoces d’un cancer du pancréas, il s’agira sans doute d’une très grande avancée dans notre combat contre cette maladie.
(1) Montoya Mira JL et coll. Early detection of pancreatic cancer by a high-throughput protease-activated nanosensor assay. Sci. Transl Med., publié le 12 février 2025.