Journée sombre dans le milieu des microbrasseries. Affectés par des baisses de ventes importantes liées au contexte économique, les propriétaires d’une microbrasserie et distillerie de la Montérégie n’ont pas eu d’autres choix que de fermer leurs portes.
«Je résumerais cela à deux mots: crève-cœur et déchirant, explique David Bergeron, le vice-président de Champ libre, qui avait été fondée en 2018. C’est une combinaison de plusieurs facteurs qui ont mené à cette décision.»
Parmi eux, on parle des baisses de ventes de 40% dans la dernière année.
«Si quelqu’un a un budget de 30$ par semaine pour de la bière, soit il met son argent ailleurs ou qu’il le dépense pour de la bière des grosses brasseries.
«Il fait des compromis sur la qualité pour continuer de boire de la bière», précise-t-il.
La PME, qui avait pignon sur rue à Mercier, en arrachait depuis un an. Bergeron, Yves Taillon et l’actionnaire majoritaire Patrick Cool ont fait des pieds et des mains pour garder leur entreprise à flot. Ils avaient même ouvert un café à même leur brasserie afin de diversifier leurs revenus. Toutefois, ce ne fut pas suffisant.
«On se battait comme des diables dans l’eau bénite pour trouver des investisseurs ou des subventions, ajoute Bergeron. C’est dur de courir avec les deux jambes cassées. On a tout essayé.»
Triani: le coup fatal
Le tapis a commencé à glisser sous les pieds des propriétaires de Champ libre dans les derniers mois de 2023. Le plus dur coup est venu du Groupe Triani Transbroue, qui leur doit près de 100 000$.
D’ailleurs, des procédures judiciaires ont été entamées et sont toujours en cours à l’endroit de Triani, qui avait acquis Transbroue en 2022.
Transbroue mettait en consigne les produits des microbrasseurs avant de les vendre aux détaillants. Le distributeur était payé pour ses ventes, mais il ne redonnait plus les sommes prévues aux brasseurs.
«Ce fut le coup de grâce», indique Bergeron.
Un avis appuyé par un chargé de projet de l’Association des microbrasseries du Québec.
«C’est un choix d’affaires qui les a tués, mentionne Éric Grypinich. Pour une microbrasserie comme la leur, ce fut fatal.
«Une microbrasserie ne peut pas perdre 1 million ou 200 000$.»
Une industrie en turbulence
Le milieu des microbrasseries est dans une période de turbulences, mais aussi d’adaptation.
«Notre industrie va relativement bien, mais on doit s’ajuster», indique Grypinich.
«Les gens ont moins d’argent dans leurs portefeuilles. Ils vont magasiner avec l’objectif de rentrer dans leur budget. De s’acheter une cannette pour le plaisir, ça ne marche plus. Les consommateurs sont maintenant à la recherche de la qualité au bon prix afin d’avoir une belle expérience.
«Ceux qui vont continuer de comprendre le consommateur, ils vont gagner», estime celui qui est dans ce milieu depuis une trentaine d’années.
Les microbrasseries du Québec en chiffres (mai 2024)
332 permis de microbrasseries
252 entreprises brassicoles
2 fermetures de microbrasseries
5 consolidations d’entreprises
Statistiques fournies par l’Association des microbrasseries du Québec