Il manque plus de 45 000 employés dans le réseau de la santé pour répondre aux besoins de la population vieillissante et retrouver le même ratio d’effectifs par habitant que celui des années 1990.
C’est ce que révèle une nouvelle étude de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) publiée aujourd’hui.
Pourtant, le domaine de la santé et des services sociaux compte plus d’employés que jamais. Toutes proportions gardées, ils sont 132 000 de plus en 2022 qu’en 1991.
«C’est dans le réseau public qu’il y a un manque réel de main-d’œuvre», explique la chercheuse Anne Plourde, qui remarque un exode des professionnels vers le privé.
Par exemple, le Québec est la province avec le plus d’ergothérapeutes, orthophonistes et technologues en radiation médicale par 100 000 habitants, selon les chiffres de l’IRIS, alors que les hôpitaux peinent à les retenir.
Pas les infirmières
Là où le bât blesse, c’est le manque d’infirmières.
En tenant compte du vieillissement de la population, ce sont 18 975 infirmières qu’il faudrait ajouter aux effectifs du réseau public pour retrouver le niveau de 1992, conclut l’IRIS.
Il s’agit de l’année de référence, car c’est «une époque où l’on considérait qu’il y avait un surplus de main-d’œuvre», ajoute Mme Plourde. Et le gouvernement de Lucien Bouchard avait encouragé les départs à la retraite, pour réduire la masse salariale. «Les mises à la retraite des années 1990 n’ont jamais été rattrapées», poursuit-elle sur l’impact de ces coupes.
Mais les infirmières sont aussi plus nombreuses à pratiquer au privé qu’avant. Celles du réseau public représentaient 85% des membres de leur ordre professionnel en 1992 et cette proportion a chuté à 72% en 2022.
«C’est un exode encore plus grave, car il y a un manque de main-d’œuvre dans la population active en général», fait valoir Anne Plourde.
Double tranchant
D’ailleurs, c’est pour contrer cet exode que le ministre de la Santé, Christian Dubé, a décidé de serrer la vis aux agences privées. Cependant, les régions éloignées font désormais face à des ruptures de service, par manque de personnel pour combler les quarts de travail sans les agences.
«Le cas des agences de placement est dramatique, souligne Anne Plourde. Ça illustre bien la dépendance du réseau aux entreprises à but lucratif et des difficultés à ramener le personnel.»
Alors que la réforme Dubé commence à prendre forme, le rapport de l’IRIS dénote aussi que chaque nouvelle réforme en santé a été suivie «d’une explosion de la rémunération des heures supplémentaires».
Privé vs public
- La main-d’œuvre totale en santé et services sociaux était de 35% plus élevée en 2022 qu’en 1991.
- 131 675 personnes de plus exercent dans ce secteur.
- La quantité d’employés par habitant dans le réseau public est de 14% inférieure au sommet de 1991.
- Il manque 45 362 employés aux effectifs actuels.
Source: IRIS