Meta, la compagnie mère de Facebook et d’Instagram, entre autres, se fout de nos élus.
Il n’y a là rien d’étonnant, de la part de ces «barbares numériques» (pour reprendre le terme du journaliste Alain Saulnier), mais ça demeure très fâchant.
Trois prises
Depuis plusieurs mois, la Commission spéciale sur les impacts des écrans et des réseaux sociaux sur la santé et le développement des jeunes tente d’obtenir un témoignage d’un représentant du géant américain.
Sans cette comparution d’une entreprise clé de notre vie numérique, le rapport de la Commission serait «incomplet», arguait la présidente, Amélie Dionne, fin novembre.
La Commission et les géants numériques jouent depuis au jeu du chat et de la souris. Après la création de la Commission en mai 2024, TikTok Canada et Meta Canada s’étaient désistées une première fois.
Malgré tout, fin novembre, la députée Dionne se montrait confiante. Des problèmes de disponibilités se posaient, mais «le canal de communication est ouvert avec Meta». (Le contraire eût étonné pour ces entreprises qui sont, précisément… des canaux de communication!)
Impatient, un membre de la Commission, le péquiste Pascal Bérubé, avait menacé de forcer Meta à se présenter devant les élus en lui expédiant une assignation à comparaître. La procédure est très rarement utilisée, mais les élus ont ce pouvoir parlementaire quasi judiciaire.
Hier, il semblerait que, pour une troisième fois, l’entreprise de Mark Zuckerberg se défilait. Au moment d’écrire ces lignes, les élus jonglaient avec la possibilité d’envoyer des «subpoenas», comme on dit couramment. Après trois «prises», ils ne devraient plus hésiter.
Pendant des décennies, nous avons plus ou moins traité l’internet, les réseaux sociaux et le numérique en général comme des zones de non-droit. La société doit y imposer ses règles.
Dans les écoles, les écrans accentuent les problèmes de concentration, contribuent à déstructurer le tissu social. Les entreprises mères des réseaux sociaux s’arrangent – tels des fabricants de drogues malveillants – pour créer des dépendances. Les preuves de ces effets délétères ne sont plus à faire.
On a trop tardé à chasser les cellulaires des classes. Maintenant que cette interdiction existe (merci au ministre Bernard Drainville), on dresse généralement un bilan positif. Et, selon des membres de la Commission, des consultations tenues auprès de quelque 500 jeunes (de la cinquième année à la cinquième secondaire) auraient clairement démontré que ceux-ci appuyaient en majorité (!) une forme d’interdiction du cellulaire partout à l’école.
Les élèves du secondaire se montreraient de plus favorables à l’instauration d’une majorité numérique rehaussée, puisqu’ils observent «leurs petits frères et leurs petites sœurs grandir dans cet univers-là et avoir accès à du contenu pas approprié», a expliqué Mme Dionne au Journal.
Souhaitons que nos élus, dans leur commission, s’entendent pour suggérer des règles claires pouvant s’appliquer à toutes les écoles, publiques comme privées subventionnées. Car il y a certaines interdictions qui libèrent.
Les parents ont aussi une grande responsabilité. Les jeunes consultés l’ont souligné: les adultes doivent montrer l’exemple et combattre l’accoutumance numérique.